Je tiens à partager avec vous quelques unes de mes réflexions que j’ai fait paraître en tant qu’article intitulé « Eloge de la gentillesse » pour le groupe du Lotus sur Whatsapp tout au début de la pandémie.
« La voie externe (Vo Dao) et interne (Qi Cong) possède des principes et des valeurs éthiques ; ces principes ne sont pas de simples mots dictés et gravés dans le marbre mais ils naissent dans chacun d’entre nous par l’expérience d’une pratique sincère, authentique et régulière en résonance avec notre être profond et avec la Nature. Un des principes essentiels est la gentillesse.
Dans nos sociétés modernes la gentillesse est dévalorisée et vue comme une faiblesse ou de la mièvrerie. Pourquoi une telle vision ?
La philosophie occidentale est marquée par une conception pessimiste de la nature humaine : l’homme est un loup pour l’homme et le « méchant » a toutes les qualités ; intelligence, talent stratégique, machiavélisme. Si l’homme est un prédateur il risque d’être entravé dans sa compétition par un excès de gentillesse. Pourtant cette vision est erronée et la dévalorisation de la gentillesse durera tant que nous persisterons à accorder plus d’importance à l’agressivité et à l’égoïsme qu’à l’empathie et à l’altruisme. Est ce que les difficultés de la vie, surtout en cette période de crise sanitaire, nous obligent-elles à écraser les autres pour tenter de nous en sortir ?
La dévalorisation de la gentillesse cessera quand nous retrouverons une manière d’être plus noble (de gentilhomme, terme qui est aussi utilisé dans l’ancien orient). Vouloir réussir, pourquoi pas, mais en réussissant aussi a être quelqu’un de bien, qui voit autrui autre chose qu’un rival ou un obstacle. Bien réussir mais sans mal se comporter, voilà l’enjeu. La dévalorisation de la gentillesse tient aussi à une certaine idée du pouvoir ; mon pouvoir est grand de ce que je retire aux autres. Au contraire, être gentil c’est avant tout se soucier de l’autre, se réjouir de son bonheur. La gentillesse est quelque chose de noble, de généreux, de l’ordre de la grandeur d’âme, dans la manière dont on accroît le pouvoir de l’autre tout en accroissant le sien. J’aime cette phrase de George Orwell qui parle de la « décence ordinaire » pour désigner cette capacité que nous possédons à vouloir vivre d’une manière douce et digne. Toute solidarité repose sur ce principe de la décence et en ces temps difficiles nous avons tant besoin de gentillesse et moins d’égoïsme. »
Vo Su Sebastian